• DéDé, LES BELLES BACCHANTES

    Dédé, les belles bacchantes

     

    Je vais vous écrire, une histoire banale et anodine,

    que n’aimaient même pas mes copines.

    L’histoire de Dédé, les belles bacchantes,

    l’histoire d’une ruine pas évidente.

    Lorsqu’on descend une pente, il n’y a pas toujours des télésièges,

    et le Dédé n’avait pas fait gaffe à son manège.

    Dans sa cité pourtant, il passait pour un aisé,

    lorsqu’au soir, il rentrait de sa sinécure, harassé.

    Une baguette sous le bras et une clope sur l’oreille,

    il était rassurant comme un rayon de soleil.

    Mais un jour, tous les dominos patiemment disposés en pyramide

    s’écroulent en un instant et tombent dans le vide.

    C’est comme un puzzle géant, lorsqu’il manque des pièces,

    on se casse la tête en de vaines recherches.

    Pourquoi la Simonne était-elle partie ?

    Rayant ainsi d’un trait l’œuvre de toute une vie.

    Ce fût un drôle de coup dur qui défrisa les belles bacchantes,

    et le Dédé ne sut plus, dans l’appartement, où poser sa viande.

    Il devint taciturne dans sa turne,

    ressassant dans son crâne, des questions diurnes,

    qui ne trouvaient même pas de réponses nocturnes.

    Ainsi notre héros qui se serait bien passé de l’être,

    somnambula et erra entre ses murs quelques jours.

    Il pensa au suicide, mais comment dignement mourir d’amour ?

    Dédé songea mettre les bouchées doubles au boulot, pour oublier.

    Mais comble de malheur, dans une compréhensible humeur,

    il envoya aller voir quelque part, son contremaître.

    C’était l’occasion que depuis longtemps, le sbire attendait.

    L’ouvrier, pourtant modèle, fût sur le champ, viré.

    Alors les bacchantes à Dédé tournèrent aussi au blanc.

    Un divorce, le chômage et puis le désespoir,

    il arriva que quelques potes, un peu paumés comme lui, l’entrainent à boire.

    Quand bientôt, l’ardoise du bistrot ne fût plus assez grande,

    que les ASSEDIC ne suffirent plus aux dettes accumulées en banque,

    que l’huissier déboula dans l’appart’ plus entretenu,

    Dédé les belles bacchantes, sur tous ses déboires, se retrouva à la rue.

    C’était le Printemps, au moins là, un bon point,

    Persona non grata, dans son quartier, il n’était plus le soleil, mais la poisse.

    Il fallût bien à force d’être dénoncé aux flics, qu’il porte ailleurs ses angoisses.

    Dédé entra dans la ronde des « sans domicile fixe ».

    Si les belles bacchantes restèrent son suffixe,

    c’est qu’au moins, il n’avait pas perdu toute son identité.

    Mais s’en est-il soucié, dans le gouffre où il était ?

    Il apprit la méfiance, une camaraderie agreste,

    et puis la solitude du vin réconfortant qui fait le reste.

    De foyers morbides en centres de décrassages sordides,

    les mois défilèrent rendant Dédé de moins en moins crédible.

    Vint le dénouement horrible, une nuit, un assassin surina Dédé qui dormait sous un porche dans des cartons,

    pour lui piquer son RMI et peut-être aussi son élégant surnom.

    C’était à l’entrée de l’Hiver, là où la misère est deux fois plus misère.

    Mais Dédé avait fini sa route, pour aller au cimetière.

    Mais qu’on ne se méprenne pas,

    il y a des milliers de ces histoires là,

    et de bien pire encore.

    Car qui maîtrise vraiment son sort ?

     

    JLB

    28 OCTOBRE 1993

     

    Dédié aux milliers de Dédé.

     

     

     

    « STELLA NOVAEREVOLUTION ROCK by THE CLASH »

    Tags Tags : , , , , ,
  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :